mercredi 10 décembre 2008

Potosi: argent, trop cher...


Me voila a Potosi, une ville Boliviene incroyable.

Elle est magnifique et est inscrite au patrimoine mondial de l'humanité de l'Unesco. Contrairement a la plupart des grandes villes d'amerique du sud les rues ne sont pas tracées au cordeau et toutes perpendiculaires ou parallèles comme un vaste échiquier. Au contraire, ce sont de petites ruelles qui s'entremêlent, vous invitant a flâner et a profiter de la vue. Les bâtiments sont magnifiques, il y a plein de vieilles églises, de résidences coloniales et d'autres bâtissent a l'architecture raffinée qui révèlent la splendeur passée de la ville. Dominant tout cela, une montagne majestueuse, le Cerro Rico.

Mais comment peut on trouver tant de splendeur dans un pays réputé si pauvre?

Le vieux centre ville domine par le Cerro Rico.


La cité fut fondée en 1545 par les espagnols après la découverte d'importants dépôts en argent dans le Cerro Rico. Suite a cette découverte ce fut la fièvre, a la fin du XVIIIeme siècle on dit que les rues étaient pavées d'argent tellement la mine c'est revelee lucrative. Encore aujourd'hui en Espagnol on utilise une expression tirée du roman Don Quichotte "vale un Potosi", "Cela vaut un Potosi" pour quelque chose d'une grande valeur. Des quantités impressionantes d'argent furent tirées de ces mines et vinrent enrichir l'espagne. Certains pensent que c'est grâce a Potosi que le capitalisme a pu prendre son envol en Europe, alors que la population locale voyait elle peu de retombées positive.

C'est a cette époque que de grandes quantités d'esclave noirs et indigènes furent amenés pour assouvir les besoins en main-d'oeuvre toujours plus importants de la mine. Beaucoup n'en sont jamais sortis et pour les autres les conditions de travail étaient tellement dure que l'espérance de vie n'était pas très élevée.


C'est assez dur a réaliser mais a la grande époque de sa splendeur, Potosi était l'une des plus grandes villes au monde, surpassant Paris ou Londres. Elle reste aujourd'hui la ville de plus de 100 000 habitants la plus élevée au monde (4060m). Grâce a cet argent la Bolivie faisait partie des premières nations du monde en terme de richesse. Depuis, la mine produit beaucoup moins et surtout il y a eu une grande instabilité politique dans le pays. Durant le dernier centenaire, il y a eu un changement de gouvernement presque chaque année. C'est dire l'instabilité politique qui règne ici. Récemment les Boliviens ont élu Evo Morales pour président, le premier d'origine indigène. Il porte sur lui tous les espoirs d'un peuple qui veut avancer et surtout en étant fier de sa culture et de son identité.

La ville de Potosi, dominee par le Cerro Rico.


Aujourd'hui la mine est encore exploitée mais les rendements sont bien inférieurs a ce qu'ils pouvaient être dans le passe. Mais ils restent suffisants pour attirer une poignée d'irréductibles prêts a braver des conditions de travail très difficile pour gagner leur vie.

Le plus incroyable c'est que l'on peut aujourd'hui visiter ces mines et aller a la rencontre des mineurs et de leurs conditions de travail.

Un guide local, ancien mineur lui même, nous amène en début de journée au marche des mineurs. La on achète quelques présents pour les mineurs que l'on va rencontrer: feuilles de coca, boissons gazeuses, alcool potable a 96 degrés (oui, oui, vous avez bien lu!), cigarettes (pas des lights, plutôt les Gitanes maïs que fumait mon grand-père quand j'étais petit!) et même bâtons de dynamites. Pour un peu plus de 1 euro vous pouvez devenir l'heureux detenteur d'un bâton de dynamite et après aller en faire un peu ce que vous voulez! Aucun contrôle! La Bolivie c'est vraiment incroyable. C'est pas tous les jours que l'on peut acheter des explosifs dans la rue. Ça m'a un peu rappelle le marche russe a Pnomh Penh au Cambodge ou on peut acheter des armes a feu en demandant gentiment.

"Comme d'habitude mon p'tit monsieur, dynamite, coca et alcool?"


Bref, ce marché est surtout l'occasion de voir le matériel et les petits remontants utilisés par les mineurs.

Le reste de la visite on le passe au coeur de la mine. Habilles comme des mineurs et équipés de lampes frontales on déambule dans les veines de la mine. Il fait tantôt frais, tantôt une chaleur étouffante. Les couloirs sont larges ou exiguës. Le silence fait parfois place au vibrations assourdissantes du marteau piqueur. L'univers est assez impressionnant et oppressant. Claustrophobes s'abstenir!

Les chariots de minerais (environ 500Kg) sont poussés a la main, comme au bon vieux temps.


Les conditions de travail des mineurs sont elles déplorables. Poussières, outils désuets (pelles, pioches, treuils manuels,...) et les seuls équipements de sécurité se résument a casques et gants. C'est vraiment Germinal! Peu de personnes d'âge mur ici. La plupart sont des jeunes qui vont s'abîmer la santé avant de prendre une retraite anticipée s'ils y arrivent. On a essaye de tâter le terrain pour savoir combien il y avait de morts chaque année dans la mine mais le sujet est délicat et nous n'avons pas eu de réponse précise. En tout cas ça met mal a l'aise.

Descente aux enfers? En tout cas ne pas regarder le film The Descent avant la visite!

Au fond d'une veine on rencontre El Tio, le dieu de la mine qui est sensé protéger les mineurs. On trouve a son pied quantité de cigarettes, feuilles de coca et offrandes d'alcool sensées attirer ses faveurs et protéger les mineurs du danger.

Au fond de la mine, El Tio veille sur les mineurs, a condition de veiller a ses besoins a lui!


Selon la croyance locale, El Tio est le dieu de la mine et la Pachamama est la déesse nature, souvent symbolisée par une montagne dans la tradition Aymara locale. De leur amour naîtrait l'argent de la mine. Les femmes sont interdites dans la mine car Pachamama est réputée jalouse.

Charges qui seront insérées dans différents forages afin de faire exploser un mur de roche.

Selon notre guide il y aurait encore des milliers de personne travaillant dans la mine mais il n'y a pas de compte exact. Chacun travaillant plus ou moins dans son coin en petites équipes sur une veine qui leur semble juteuse.

Rappelez vous, en Australie j'avais visite la mine d'or de Kalgoorlie qui est l'une des plus grandes du monde. Pourtant, il y a quelques décennies encore, quantité de mineurs exploitaient chacun dans leur coin un trou avec des moyens rudimentaires. Puis un gars est venue avec une idée de génie: en regroupant toutes les concessions ils pourraient avoir une mine suffisamment grande pour rendre rentables des moyens d'exploitations industriels et rendre la région bien plus profitable que la somme de chacune de ces petites concessions. L'union fait la force en quelque sorte et ça a parfaitement marche.

J'ai essaye de tâter le terrain pour savoir pourquoi ils ne pouvaient pas faire la même chose ici mais ce n'est pas gagne. Les mentalités ne sont pas assez mures ou alors je ne me suis pas montre assez convaincant!

Par contre, la ou il n'y a pas besoin de batailler longtemps avec un mineur c'est pour mâcher la coca. Elle est une part très importante de la culture des Andes et est réputée réduire fatigue, faim, sensation de froid et mal des montagne (ou de l'altitude). Je m'y suis également mis car j'en avais un peu marre d'être essouffle comme un labrador obèse après 20Km de jogging en montant un escalier de 12 marches. Je ne sais pas si c'est l'effet placebo ou quoi mais en tout cas ça marche sur moi.

Mode d'emploi pour bien "chiquer": d'abord on enlève la ramification principale de la feuille de coca pour ne pas se blesser les joues. Ensuite on enfourne un petite poignée de ces feuilles entre la joue et la mâchoire supérieure. On laisse bien imprégner de salive sans mâcher. Quand le tout est bien humide et ramolli on peut rajouter un catalyseur (la llipta: cendres d'une plante) pour faciliter la libération des alcaloïdes contenus dans les feuilles. On sent sa joue s'engourdir légèrement, comme apres une anesthésie locale chez le dentiste, et une sensation globale de légère excitation et de meilleure résistance a la faim ou la fatigue.

Attention! Ce n'est pas un trip a la cocaïne! L'effet n'est pas plus violent qu'un expresso bien serre et il passe souvent pratiquement inaperçu.

Re-attention! La feuille de coca n'est pas a confondre avec la cocaïne tout cours. La première est sujet de fierté nationale et est légale en Bolivie. Beaucoup de personnes l'utilisent et il n'y a aucun méfait sur la santé. D'un point de vue culturel c'est comme le rouge en France, pas touche! De l'autre, la cocaïne est un stupéfiant, infiniment plus concentre et puissant que les feuilles de coca et dangereux pour la santé. Très peu de Boliviens la consomme, même si elle est ici beaucoup moins chère qu'en occident elle reste un produit onereux, quasi exclusivement destiné a l'exportation (clandestine bien sur, comme la fabrication!) a l'étranger.

Voila un bref topo sur 2 ressources qui ont fait le bonheur ou (surtout) le malheur de ce beau pays.

Aucun commentaire: